Le ciel est gris profond vers Couëron. La tour à plomb perce difficilement. Un rayon de soleil s’échappe plus au sud, au dessus de la crêperie L’escale où nous allions manger parfois. Sur nos visages sa chaleur.
Tu m’accompagnes au pied du bac, mais je serai la seule à y monter. Moins de vingt-quatre heures ensemble, comme tu dis en feignant la plaisanterie. J’essaie de me détacher. Je sais que ça ne serait pas toi si tu ne me faisais pas ce reproche. Trop peu. Trop long déjà, quand même. Accoudé à la rambarde je regarde la Loire, je repense à toutes les fois où nous avons pris le bac pour se séparer. Ici ou à Basse-Indre. Je te sens mélancolique à chaque fois. Et rien n’y fais, je m’en veux toujours un peu. Je te fais un signe de loin. Tu n’y réponds pas. Tant pis. Mon téléphone sonne, ma vraie vie reprends, ma vie nantaise. Un appel pour parler d’un projet radio. Le bac démarre, ma discussion continue et tu es de plus en plus petit. L’image est belle, tu te détache sur ce gris, surélevé au dessus de ce fleuve immense.
(Notre séparation et ce bateau notre lien, mon pont entre deux vies)